Lutte contre les importations : le rôle indispensable des autorités en Europe et en France

La filière de la Volaille Française demande le soutien des Pouvoirs publics afin de freiner les importations de volailles à bas coût, ne respectant ni les mêmes exigences réglementaires que les volailles françaises ni les mêmes bonnes pratiques des éleveurs. Il s’agit donc d’accompagner les acteurs de la filière tant au niveau national qu’européen afin qu’ils puissent fournir des volailles françaises aux Français et ainsi contribuer à la souveraineté alimentaire du pays.

Europe : un coup de frein indispensable aux importations

Au niveau européen, la filière a besoin du soutien des autorités françaises pour lutter contre les importations à bas coût. Elle appelle en particulier le Gouvernement à veiller à éviter l’ouverture des frontières à de nouveaux contingents d’importations de poulets. De plus, elle demande son intervention auprès des autorités européennes afin d’intégrer des clauses miroirs aux accords en cours. En effet, les importations doivent être soumises aux mêmes obligations que les volailles françaises, et non à leur simple équivalence, et proposer une qualité de produit similaire aux consommateurs, comme ils sont en droit de l’attendre. Les acteurs de la filière estiment ainsi nécessaire que les autorités européennes renforcent les contrôles effectués dans les pays producteurs fournissant des volailles en Europe.

BON À SAVOIR

En moyenne, une exploitation française standard compte deux poulaillers, d’une surface totale de 2 300 m² pour 40 000 volailles. Une exploitation Label Rouge compte environ trois poulaillers de 400 m2 pour 4400 volailles par poulailler, avec un parcours extérieur de 2 m² par poulet, au minimum. En Europe, la taille moyenne des exploitations est plus importante et les élevages abritent la plupart du temps plus de 60 000 volailles. La taille des élevages est encore plus importante dans des pays comme la Thaïlande ou l’Ukraine, où il peut y avoir jusqu’à 2 millions de volailles sur un seul site.

Demande d’activation de la clause de sauvegarde pour l’Ukraine

Sur le cas particulier de l’Ukraine, l’interprofession de la volaille française demande au ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté Alimentaire, Marc Fesneau, d’activer la clause de sauvegarde pour empêcher la poursuite des importations de viande de poulet, à droit nul et sans limite de volume, dans le cadre de l’accord commercial entre l’Union européenne et l’Ukraine, renouvelé le 6 juin pour un 1 an.

Il faut en effet savoir que la reconduction de cet accord revient à offrir à un seul et même groupe volailler industriel, coté en bourse à Londres et dont le siège est basé à Chypre, l’opportunité de continuer à inonder le marché européen et à développer son activité dans un pays en guerre, au détriment de la production locale française et européenne. Cette décision aura ainsi de lourdes conséquences pour la filière en France et en Europe, sans pour autant profiter à la population ukrainienne.

Comme ils l’ont rappelé à de multiples reprises, une telle prolongation constitue, pour les professionnels de la filière avicole, une ligne rouge à ne pas franchir. La France doit en effet agir en accord avec ses discours sur la souveraineté alimentaire.

Jusqu’à 25 000 tonnes de viande de volailles ukrainiennes importées chaque mois en Europe

À titre indicatif, sur les 24 premières semaines de 2023, les importations communautaires en provenance d’Ukraine ont augmenté de 108 %, dont 201 % sur la viande fraîche ! En moyenne, ce sont entre 15 et 25 000 tonnes de viande de volailles qui arrivent chaque mois d’Ukraine sur le territoire européen. Bien que l’Interprofession soutienne la nécessité d'une action commune de l’Union européenne pour aider l'Ukraine, elle estime injuste que son secteur supporte une part aussi importante de la charge collective.

Un accord mortifère pour la souveraineté alimentaire

Cet accord est mortifère pour la souveraineté alimentaire française, incompréhensible pour les éleveurs et destructeurs pour l’industrie. Pour rappel, la France a laissé conclure un accord entre l’Union européenne et le Chili en fin d’année dernière, ouvrant les portes à 18 000 tonnes de viande de poulet importées supplémentaires. Ces importations massives et à bas coût fragilisent trop dangereusement la filière, déjà très affaiblie par l’influenza aviaire et son déficit de compétitivité.

Un double langage incompréhensible pour les professionnels

Le double langage du Gouvernement, qui consiste d’un côté à assurer la filière de son soutien plein et entier pour lutter contre les importations déloyales, de son engagement sans faille pour s’opposer aux accords déséquilibrés et, d’un autre côté, dans les faits, à accepter des accords ou des projets d’accords qui la sacrifient, est insupportable pour les professionnels. Cette attitude leur fait même craindre le pire pour les négociations avec le Mercosur.

L’activation de la clause de sauvegarde : l’initiative de la dernière chance

C’est pourquoi, dans une ultime tentative d’infléchir le cours des choses, l’Interprofession demande aujourd’hui au ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté Alimentaire d’activer la seule et dernière carte qu’il a en main : l’activation de la clause de sauvegarde (dont les modalités ont été assouplies dans le cadre du renouvellement de l’accord) pour stopper une fois pour toutes cette concurrence déloyale qui asphyxie le secteur. L’Interprofession lui demande aussi de convaincre ensuite ses homologues des autres États Membres d’engager le même processus. Le Commissaire européen semble aussi ouvert à la démarche, l’Interprofession demande de le soutenir et de tout faire pour qu’elle aboutisse.

France : un soutien au développement et à l’identification de l’offre française

En France, la filière demande aux autorités de la soutenir dans le développement de ses capacités de production afin de contrer les importations. Il s’agit en effet d’être en mesure de répondre aux attentes en poulets standards, émanant en particulier de la restauration hors domicile et des entreprises alimentaires. L’Interprofession en appelle à l’appui et à l’accompagnement du Gouvernement pour installer, agrandir et rénover des poulaillers classiques. La production française de poulets standards a en effet toute sa place aux côtés des offres de plein air et répond aux besoins du marché de disposer de poulets de qualité à un prix optimal. La filière en appelle également aux Pouvoirs publics pour favoriser le dialogue avec les citoyens afin que les éleveurs puissent exercer leurs activités sereinement.

Par ailleurs, l’Interprofession demande que l’identification des Volailles Françaises soit facilitée pour les consommateurs. C’est pourquoi elle sollicite l’élargissement de l’étiquetage de l’origine des volailles à tous les modes de consommation. En effet, s’il est déjà obligatoire pour les volailles vendues en magasin et pour les volailles fraîches réfrigérées, surgelées ou congelées proposées dans les restaurants, il est indispensable que l’obligation s’étende à la viande en tant qu’ingrédient pour que l’ensemble des produits élaborés et transformés y soient contraints.

De plus, l’Interprofession souhaite un renforcement des contrôles en la matière afin que cette mesure d’étiquetage soit rigoureusement appliquée pour contribuer à mettre en valeur le savoir-faire exemplaire des professionnels de la Volaille Française. ANVOL encourage en outre les clients à systématiquement s’informer sur l’origine des viandes qu’ils consomment afin d’éclairer leur choix.

Seulement 15 % des restaurants répondent à l’obligation légale

Depuis le 1er mars 2022, un décret impose aux établissements de restauration proposant des repas sur place ou à emporter, d’indiquer aux consommateurs l'origine des viandes de volailles, porcs et moutons qu'ils mettent à leurs menus, comme c’était déjà le cas pour la viande de bœuf depuis 2002. Une avancée importante que l’Interprofession de la Volaille de chair - ANVOL - sollicitait de longue date. Pourtant, une récente enquête* montre que seuls 15% des restaurants répondent à cette obligation. Si l’obligation n’est pas respectée, c’est avant tout par manque d’information.

La filière des volailles françaises estime ainsi qu’un décret de cette nature, sans communication officielle et sans contrôle, n’a aucun effet si ce n’est de produire un bénéfice politique momentané et d’embellir les discours des ministres de l’Agriculture qui se succèdent. Ce décret doit absolument être accompagné d’un dispositif de communication et de contrôles pour que la souveraineté alimentaire ne reste pas un vain mot.

Si la filière des volailles françaises est consciente du rôle qu’elle doit jouer pour diffuser largement cette information et l’accompagner d’une démarche autour de son logo « Volaille Française », il paraît urgent que l’État passe également à l’action. Il est indispensable, d’une part, qu’il accentue la communication autour de l’application de ce décret et, d’autre part, qu’il intensifie les contrôles de la DGCCRF dans les établissements concernés.

Des actions d’autant plus urgentes à mener que l’application du décret n’est pour le moment prévue que jusqu’à février 2024, ce que déplorent les professionnels des volailles françaises, qui appellent à sa pérennité.

 

*Étude Roamler réalisée pour ANVOL et l’APVF (Association pour la Promotion de la Volaille Française) au printemps 2023 auprès de 380 établissements français de restauration, chaînés ou indépendants.

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